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Le bruit court que, dans cette école, il y aurait des élèves qui aimeraient vraiment la musique … Certains d’entre eux iraient, dit-on, jusqu’à ouvrir l’étui de leur instrument chez eux pendant la semaine pour travailler leurs morceaux. On croit rêver ! En fait, il y en a même qui ont poussé tellement loin cette étrange manie qu’ils ont fini par devenir, un jour, des « professionnels ». Que s’est-il passé ? Que leur est-il arrivé ? Comment prend-on, un jour, la décision de se lancer dans cette carrière pas comme les autres ? Dans cette rubrique, nous vous proposons de découvrir leur avis sur la question…

Antalia Monperat

C’est en 1996 que la jeune Antalia entre à l’ENMD. Elle y suivra neuf années d’études, en trompette et en piano. Elle se sent très à l’aise dans l’école mais, malgré les conseils de certains de ses professeurs, n’envisage pas du tout la carrière de musicienne. « Je me dirigeais vers une carrière de fonctionnaire puis, quelques mois avant le Bac, mon père et moi avons considéré la possibilité du cursus musical que proposait la fac de Montpellier. Et, puisque je me plaisais vraiment dans le monde musical… »

Dès lors, pourquoi hésiter ? Premier séjour en France et inscription en musicologie. « Ce n’était pas simple car je n’avais même pas passé le Bac en option musique ! Mais comme j’avais acquis de sérieuses bases instrumentales à Cayenne, les choses sont rentrées dans l’ordre et j’ai été admise à l’université. » Dans la foulée, Antalia auditionne et est également admise en classe de trompette au conservatoire de Montpellier.

« A la fac, explique-t-elle, j’ai vite remarqué qu’il y avaient deux sortes d’étudiants : ceux qui font de la théorie sur la musique… et ceux qui la jouent. Par contre, au conservatoire, c’était ENORME ! » En effet, très vite, la jeune trompettiste n’arrête pas d’apprendre et de jouer : harmonie de cuivres, orchestre symphonique, big band, défilés carnavalesques (ça, elle connait déjà!), mais aussi musique baroque… Elle suit également des cours à l’Ecole de Jazz de Montpellier où elle s’initie à l’improvisation et au fameux « Real Book », bible des standards de jazz. Enfin, elle joue avec un groupe de rock, « Short Cuts », avec lequel elle découvre la scène et le public.

Licenciée en musicologie et diplômée du CAPES d’enseignant, Antalia a commencé sa carrière de jeune professeur de musique au sein de l’académie de Strasbourg. Aujourd’hui, à 25 ans, elle enseigne à temps complet dans le département 91. Mais, comme on pouvait s’en douter, cela ne suffit pas à étancher sa soif d’apprendre et de jouer : elle fait partie d’une harmonie locale, du réputé big band « Jazz au Top » et de l’orchestre symphonique du conservatoire d’Estampes.

Lorsqu’on lui demande si elle ne souffre pas de manquer de temps libre ou, éventuellement, de pratiquer d’autres activités que la musique, cette bosseuse-née ne semble même pas relever la question : « Ce qui est génial dans le métier de musicien, confie-t-elle, c’est de se faire plaisir et, en même temps, de voyager et de rencontrer des gens fantastiques ! »

Pas mal, pour une jeune fille qui voulait être fonctionnaire !

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Hervé Jean-Charles

C’est à l’âge de six ans qu’Hervé a commencé à fréquenter l’ENMD. Il assistait au cours de violon de sa grande sœur Véronique, sagement assis sur une chaise et ses pieds ne touchaient pas encore le sol. Aujourd’hui, âgé de 30 ans, il préside aux destinées de sa propre école de percussions « Tambou Leve », située au cœur de Cayenne. Entre ces deux étapes, se sont évidemment produits quelques évènements…

« J’ai commencé par la clarinette mais, malgré tout le talent de mon professeur, Frank Bilot, j’ai fini par découvrir, à treize ans, que mon instrument de prédilection était le tambour. J’ai donc étudié les percussions avec Sylvestre Serrotte, Jean-Paul Agarande et Reno Cipe. »

Dès lors, comment passe-t-on du rôle d’élève à celui de professeur ?

« Ma mère recevait souvent du monde pendant les week-ends et c’est en montrant aux enfants qui étaient là comment jouer du tambour que j’ai pris goût à la transmission de la musique. De plus, il est apparu que c’était moi le plus patient pour exercer cette activité ! Transmission et patience : c’est probablement de cette manière que j’ai pris goût à la pédagogie. »

Mais, entre le sens de la pédagogie et la gestion d’une école, il y a un pas que tout le monde ne franchit pas forcément. Après son BAC, Hervé se dirige vers une licence d’anglais tout en continuant à jouer et à enseigner les percussions. Important : il apprend à fabriquer des tambours avec son professeur, Jean-Paul Agarande. « Fabriquer un tambour, puis fabriquer des tambours… L’idée que je pourrais peut-être vivre de cette activité a commencé à cheminer dans ma tête ! En fait, c’est l’univers de la percussion dans son ensemble qui me passionnait. Et puis, en continuant à « transmettre », je découvrais chez les jeunes élèves une motivation encore plus profonde que je ne l’avais imaginée…»

A ce jour, l’école « Tambou Leve » compte une soixantaine d’élèves, encadrés par sept enseignants qu’Hervé voudrait voir formés au mieux : tous sont inscrits « d’office ! » à l’ENMD pour la rentrée prochaine afin de continuer à développer leurs connaissances musicales. « Ils sont déjà détenteurs des diplômes concernant l’encadrement des enfants mais je souhaite, explique le jeune directeur, que les gens qui travaillent avec moi aient la même formation que moi. Etre un fin « tambouyen » et avoir de l’instinct ne suffisent pas à faire de vous un vrai musicien. Le solfège, la formation musicale et la pratique d’autres instruments développent l’oreille et vous ouvrent à d’autres styles de musique que celui dans lequel vous êtes né. Un chef d’orchestre se doit d’être capable d’aborder le plus de cultures musicales possibles.»

En dehors de cet encadrement compétent, faites-vous appel à des intervenants extérieurs ?

« J’ai, bien sûr, de bons contacts avec les percussionnistes du département. Nous avons également invité Sakyo (Guadeloupe) et les fabuleux brésiliens du groupe Olodum (voire le clip de Michael Jackson) sont venus faire une « bateria » d’enfer, là juste devant l’école ! » .

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Caroline Sylvestre

Lors d’un certain évènement récent dont vous avez peut-être entendu parler concernant l’ENM … Pardon ! Le nouveau « Conservatoire de Musique, Danse et Théâtre de Guyane », à Rayonnement Départemental, vous avez pu assister à quelques manifestations musicales spécialement programmées pour l’occasion. Notamment le concert final réunissant quelques grands noms de la scène guyanaise. Au cours de cette soirée étincelante, les spectateurs les plus perspicaces auront remarqué la présence, dans la section des cuivres, de deux jeunes guyanaises aussi charmantes que talentueuses. Au pupitre de trompettes, il y avait Antalia MONPERAT (que nous avions interviewée il y a quelques semaines) et, au trombone, une certaine Caroline Sylvestre, également « ex » élève de l’école, elle aussi, poursuivant sa carrière de musicienne dans l’hexagone. Caroline n’était pas revenue au « péyi » depuis 12 ans, alors elle nous donne un peu de ses nouvelles …

« J’étais élève de l’ENMD entre 1989 et 1997. J’ai commencé par trois années de violon avec M. Gilles HUBERT, puis, à cause d’un problème physique qui m’empêchait de jouer, j’ai arrêté l’instrument tout en continuant la formation musicale. » Il y a des musiciens qui sont naturellement attirés par les sons graves (heureusement, sinon que deviendraient les autres, les « aigus » ?) Dans la famille des cordes, c’est la contrebasse qu’ils vont choisir sans hésiter ; pour les cuivres, ils craqueront pour les trombones et autres tubas ! Caroline découvre qu’elle fait partie de la deuxième catégorie. « J’ai donc commencé le trombone avec Mr Jean-Yves GARCIA, tout en m’intéressant au tuba ».

A 16 ans, elle part dans l’hexagone, où elle fréquente les conservatoires de Villeurbanne et de Montpellier. Elle commence à enseigner dès 2003 et, en 2008, et obtient deux Diplômes d’Etat (DE), en trombone ET en tuba ! Armée, en outre, d’un DEM (Diplôme d’Etudes Musicales) en FM et en musique de chambre, la jeune Cayennaise peut, dès lors, se lancer dans la carrière (ô combien aléatoire !) de musicienne.

« Comme nous tous, j’ai commencé par des remplacements et des « cachetons » à droite, à gauche. J’ai une licence de musicologie et j’ai un DEM d’euphonium : un petit tuba, très populaire en Angleterre et aux U.S.A, et qui a la même tessiture que le trombone… en plus rapide, grâce aux pistons ! Mon professeur à Villeurbanne était M. Christian DELANGE, « le » spécialiste français de cet instrument.»

Contre toute attente, Caroline, malgré le sérieux et la qualité des études qu’elle poursuit, se prend à regretter les grandes manifestations des fin d’années de … l’ENMD, là-bas, à Cayenne ! « Dans les écoles que j’ai fréquentées, les profs étaient excellents mais chaque classe faisait séparément son audition et son examen de fin d’année, et puis voilà ! »

Et la Guyane ? Quelles sensations après 12 ans d’absence ? Invitée par l’école (comme sa collègue trompettiste Antalia) à l’occasion du 25ème anniversaire, elle s’est consacrée, en vraie professionnelle, aux répétitions et aux prestations scéniques de l’évènement : « Depuis mon départ, la nouvelle école de musique et son auditorium sont vraiment, pour moi, les changements majeurs du département ! »

Ca, c’est ce qui s’appelle un « regard objectif » !

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